Things seem so unstable, but for a moment we were able to be still

C’est encore une chanson, et c’est encore Florence Welch : nul doute qu’elle est l’artiste dont la sensibilité trouve le plus de résonance en moi, et que les paroles qu’elle écrit se teintent d’un écho tout particulier dans mon cœur. Dans « No Choir », elle rappelle combien le monde est mouvant et inquiétant, dangereux et instable ; mais elle évoque surtout ces parenthèses qui, parfois, comme un miracle fort inattendu, viennent ordonner le désordre. La solitude ne nous quitte jamais véritablement – « Always Lonely », clame une illustration dessinée par Florence Welch elle-même – mais on parvient parfois à la mettre de côté, en la compagnie d’un « quelqu’un » qui sait nous la faire oublier. « C’est dur d’écrire sur le bonheur », confie Florence. Je suis on ne peut plus d’accord. J’ai toujours pensé qu’il fallait être malheureux pour être inspiré. Pourtant, ce texte prouve le contraire. Alors, que puissent perdurer les parenthèses. Continuer la lecture Things seem so unstable, but for a moment we were able to be still

I’d Rather Be Dry, But At Least I’m Alive

On n’est jamais seul quand il y a la musique. On dit qu’elle adoucit les moeurs, et c’est vrai. C’est beau, les chansons, parce qu’elles traversent les époques avec vous, et que les émotions que vous ressentez aujourd’hui en les écoutant sont différentes de celles que vous ressentiez il y a dix ans – et quand même, c’est toujours vous, et c’est toujours la même chanson. Des « mots qui marquent », des mots qui me marquent, il y en a beaucoup. On en voit, on en lit et on en entend, de partout, tous les jours. Des grands mots, des petits mots ; de discrètes voix et de grands auteurs. Et parfois, les mots qui nous marquent, ce sont les mots tout simples, les mots sans prétention, d’une chanson pop qui vient de se révéler au monde. Il ne faut jamais sous-estimer les paroles des tubes populaires. Elles paraissent bien modestes, cachées derrière la voix de stars grandiloquentes, derrière des chorégraphies stylées, des instrus rythmées, des costumes iconiques. Mais parfois, ce sont justement ces mots-là qui arrivent pile au bon moment, pile au bon endroit, et visent tout juste où ils devaient viser. Il suffit parfois d’une Lady, tout sourire et toute fière d’avoir changé en paillettes les douleurs qui sont les siennes, qui vous confesse qu’elle a tant et tant pleuré qu’elle préférerait ne plus jamais verser une seule larme – mais qu’en attendant, et tout du moins, lorsqu’elle pleure, elle est en vie. J’ai écouté cette chanson à sa sortie, au petit matin, et j’ai été bien incapable d’écouter quoi que ce soit d’autre pendant toute la journée qui a suivi. Je crois bien que l’explication se trouve dans ces petits mots qui marquent. Alors, qu’il pleuve sur moi – et que mes larmes soient la preuve que je suis plus vivant que jamais. Et à toutes les chansons qui arrivent au bon moment. Continuer la lecture I’d Rather Be Dry, But At Least I’m Alive

Ceux qui rêvent et ceux qui ne rêvent pas

Ainsi, tu crois savoir qu’on ne peut diviser le monde qu’en deux espèces : d’un côté, ceux qui ont des rêves ; de l’autre, ceux qui les ont accomplis. 

D’après toi, les premiers courent après des chimères, et s’émeuvent de ne pas savoir, de ne pas pouvoir les matérialiser. Ils perdent leur temps et leur énergie en rêveries, imaginent leur vie au lieu de l’entreprendre. Ce sont les immobiles et les incapables, les faibles et les perdants. 

Ceux qui ont accompli leurs rêves, en revanche, ont tout gagné, tout réussi. Parce qu’ils ont agi, ils valent mieux que les autres ; parce qu’ils ont accompli, ils se sont accomplis. Ce sont eux, qui méritent toute l’estime du monde, quand les autres, les bons-à-rien, méritent, au mieux l’ignorance, au pire le mépris.

De ces deux catégories, tu te désoles de faire partie de la première, inlassablement et inéluctablement : tu cours après tes rêves, sans jamais les atteindre : tout juste les frôles-tu, de tes doigts bien trop courts et bien trop frêles. 

Et pour cela, tu t’en veux. Pour cela, tu te crois faible, indigne d’être aimé, indigne d’être considéré. Parce que là-bas, en face, il y a ceux qui ont agi ; et que toi, tu ne fais, car tu ne sais, que rêver.

Vois-tu, c’est là que tu te trompes. Continuer la lecture Ceux qui rêvent et ceux qui ne rêvent pas

Dès que l’être humain est seul il bascule dans la déraison

Pour un bon nombre d’entre nous – et j’en fais partie – cette période de confinement est synonyme d’une solitude extrême et exacerbée. Dans « Écrire », Marguerite Duras parle de solitude. Et d’écriture. Et du lien de cause à effet entre les deux. Il faut être seul pour écrire, sans doute parce qu’il faut être seul pour penser ; mais cette solitude n’est pas sans dommages collatéraux. L’extrait que je partage aujourd’hui m’a été révélé par l’un de mes amis les plus proches, il y a quelques temps, un jour où je me sentais très seul (je n’ai pas attendu le confinement pour cela). Ces temps-ci, j’y pense beaucoup. Continuer la lecture Dès que l’être humain est seul il bascule dans la déraison

Boum

Boum. Boum. Boum.

Off with your head – Dance til you’re dead.

J’adore cette chanson, bordel. Heads Will Roll. Les Yeah Yeah Yeahs. Ça vieillit pas. Je m’en lasse pas. Du rock un peu dark, qui assassine la nuit, et la fait mourir d’une violente agonie. Dans le genre « meurtre sur le dancefloor », c’est ce qu’on a fait de mieux depuis Sophie Ellis-Bextor.  Danse jusqu’à la mort, danse jusqu’à ce qu’on te coupe la tête ; danse, danse, danse sur ces notes graves et ténébreuses, sur cette ligne de basse entêtante qui te fait sombrer dans la nuit la plus noire, qui te fait plonger au plus profond de tes tripes. Les hommes crient et pleurent, les femmes crient et pleurent, et ils dansent, et elles dansent – dansent, dansent, dansent jusqu’à leur mort. Des têtes vont tomber, et le pire, c’est qu’on va aimer ça. Continuer la lecture Boum

Feed me with sorrow

Il existe dans mon cœur une force qui me tire vers le bas.

Non pas qu’elle soit une entité consciente, volontairement néfaste, dont le dessein serait de m’entraîner vers la souffrance.

C’est plutôt qu’elle est née de la souffrance, précisément, et qu’elle n’a jamais appris à se nourrir d’autre chose. Continuer la lecture Feed me with sorrow

Par la fenêtre

Par la fenêtre, la ville s’étendait à perte de vue. Dans la grisaille, les immeubles dessinaient des droites parallèles, et de leur ombre, écrasaient la ville tout entière. Cette vision d’une capitale démesurée, depuis l’endroit où je me tenais, laissait la désagréable impression d’être trop petit dans un monde trop grand. Continuer la lecture Par la fenêtre